logo facebook

« Il n’y a pas de barrières insurmontables »

le lundi, 06 décembre 2021. Publié dans Rencontres, Point de vue

© Le Nouvelliste

© Le Nouvelliste

Alain Barrillier est juriste à la RTS (Radio Télévision Suisse) depuis plus de 20 ans. Sa particularité : il est aveugle.

Dès sa naissance, il perd progressivement la vue à la suite d’une maladie rhumatismale. À 12 ans, il ne perçoit plus que la lumière et à 30 ans il devient complètement aveugle.

L’équipe de Synergies l’a rencontré.


 

À l’université
Au début de son cursus universitaire, Alain Barrillier pouvait compter sur des étudiants payés par l’assurance invalidité : « ils me lisaient les polycopiés des cours que j’écoutais sur cassette. Je n’avais que ce support-là. »
Heureusement, l’informatique est arrivée : « grâce à elle, j’ai pu accéder à la jurisprudence suisse et aux lois fédérales. Maintenant, l’accès est plus large, la plupart des documents étant numérisés et lisibles sur internet. »

Il a été également bien entouré par ses professeurs et les étudiants : « ils étaient toujours présents pour m’aider. J’ai eu vraiment un soutien très positif pendant toutes mes études. »



Activité professionnelle
« Je suis juriste dans les domaines de l’audiovisuel, de la radio et du digital. Je m’occupe, au niveau juridique, des droits d’auteurs, des droits sur la musique, autorisation, cession des droits de diffusion pour les émissions et licences commerciales liées à la vente des programmes. »

Alain utilise un ordinateur adapté avec une synthèse vocale : « une ligne braille me permet de lire ce qui est écrit de manière précise à l’écran et de vérifier l’orthographe. Avec ce système, je peux accéder rapidement aux contenus que je souhaite. »

Une personne rémunérée par l’assurance invalidité l’aide à accomplir certaines tâches non accessibles telles que la mise en page de documents, la lecture de son courrier ou la recherche juridique.



Le regard des autres
Dans le monde restreint de l’audiovisuel, tout le monde se connaît : « les gens que je côtoie réagissent toujours très positivement vis-à-vis de mon handicap. Il n’y a jamais de problèmes. » Alain est reconnaissant envers ses collègues de travail : « ils me donnent souvent des coups de main. Ils s’arrangent toujours pour adapter leurs méthodes de travail afin de me les rendre plus accessibles. J’ai besoin des autres pour être autonome. Actuellement, en raison du contexte sanitaire, je suis essentiellement en télétravail. Je ne parle pas forcément de mon handicap avec mes interlocuteurs. »



Accessibilité du monde professionnel
Pour Alain Barrillier, les entreprises suisses sont totalement prêtes à engager une personne aveugle à condition qu’elles soient informées et qu’elles aient la possibilité de faire un test avec cette personne pour voir si elle convient au poste. « Cela donne une nouvelle dimension à l’entreprise ou au secteur dans lequel la personne est intégrée », souligne-t-il.

« On pense souvent qu’être aveugle est un gros handicap. Mais une personne non voyante peut avoir une vie sociale et professionnelle active. Il faut simplement trouver une stratégie adéquate pour pouvoir faire les activités que l’on souhaite. Il n’y a pas de barrières insurmontables. »



Ses hobbies
Plus jeune il pratiquait beaucoup de sports tels que le ski alpin, le vélo-tandem, le ski nautique et le parapente.

« J’ai réalisé un vol solo d’abord au Mont-Blanc en 1993 et ensuite au mont Fuji-Yama en 1995. Une télé japonaise est venue filmer mon saut au Mont-Blanc. Comme ce reportage a eu pas mal de succès au Japon, j’ai été invité avec un copain paraplégique dans ce pays pour faire le vol du Fuji-Yama. Nous avons dédié ce vol de la paix à la mémoire des victimes des bombardements sur Hiroshima et Nagasaki qui ont eu lieu 50 ans jour pour jour avant notre vol ».

Selon une interview parue dans le Nouvelliste en 2010, nous apprenons qu’il « est l’instigateur du kilomètre lancé en Suisse pour personnes handicapées. Il a accumulé les titres - champion suisse de descente en ski de piste plusieurs fois dans les années 80 ; il a obtenu le premier record du monde de kilomètre lancé pour handicapés de la vue en 1995 ».

Aujourd’hui, Alain Barrillier se passionne plutôt pour la littérature : « je lis des livres qui sont enregistrés à la bibliothèque sonore romande, principalement des romans policiers, fantastiques et de science-fiction. »

« Je remercie également ma famille, qui m’a toujours soutenu pendant mes études et dans ma vie quotidienne », conclut Alain Barrillier.


 Vidéo : Alain Barrillier en parapente au Mont-Blanc

Parcours
Alain Barrillier est âgé de 55 ans. Il est marié et habite actuellement à Vevey.

Il commence l’école au Petit-Lancy jusqu’en sixième primaire. Ensuite, il rejoint le Centre pédagogique pour handicapés de la vue où il termine sa scolarité obligatoire. Il est pensionnaire à l’institut des jeunes aveugles à Lausanne et en 1984, il intègre l’école de commerce de cette ville et obtient sa maturité.

En 1988, il revient à Genève pour réussir 3 ans plus tard une licence en droit à l’Université. Il fait un stage d’avocat et obtient son brevet en 1996.

Il est actuellement juriste d’entreprise à temps plein à la RTS, depuis 2000.

Galerie Vidéo