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Les handicaps invisibles : les troubles visuels - témoignage

le lundi, 20 décembre 2021. Publié dans Rencontres, Point de vue

Les handicaps invisibles : les troubles visuels - témoignage

Chantal Hegi a 31 ans, est en couple et a deux enfants. Elle est réceptionniste à l’Atelier des Moyens Auxiliaires de la Fondation Foyer-Handicap. Un poste qu’elle occupe depuis bientôt 10 ans. D’ailleurs, elle précise avec conviction : « J’adore vraiment mon travail ! »

Chantal souffre d’un handicap visuel de naissance. Son champ de vision est restreint : « Je ne vois ni de près, ni de loin, je suis “comme un cheval avec des œillères”, explique-t-elle. Je suis aussi atteinte de daltonisme. Par ailleurs, j’ai également de petits problèmes neurologiques qui viennent s’ajouter à mon handicap visuel, mais tout cela ne m’empêche cependant pas d’avoir une vie normale. »

Elle souhaite changer le regard des gens sur les handicaps invisibles : « On n’en parle pas assez ! Les personnes non voyantes, par exemple, on les reconnaît, car elles portent des lunettes noires et ont parfois une canne blanche. Moi, je porte juste des lunettes et on ne comprend souvent pas pourquoi j’ai un emploi adapté. »



Parcours
Le parcours scolaire et professionnel de Chantal, avant d’intégrer la Fondation, a été quelque peu chaotique. Après avoir suivi l’école primaire classique, elle a poursuivi sa scolarité dans une école privée et a fréquenté l’École de Culture Générale (ECG) pendant 2 ans.

Durant toutes ces années, elle a été confrontée à des difficultés concrètes : « J’ai pris beaucoup de balles dans la figure lors des cours d’éducation physique avant que les professeurs comprennent que ce n’était pas adapté pour moi ».

Puis, elle a effectué des stages dans différentes entreprises qui n’ont pas été concluants.

Finalement, elle s’est présentée à la Fondation Foyer-Handicap où elle a été engagée : « Je n’en suis plus ressortie », dit-elle avec le sourire.



Des stratégies pour pallier les difficultés du quotidien
Au travail, lorsqu’elle doit utiliser l’ordinateur, Chantal emploie un logiciel spécifique pour agrandir l’affichage à l’écran.

À son domicile, des lampes spécifiques diffusant de la lumière blanche sont installées dans la cuisine et dans la chambre.

Avec les transports publics, c’est parfois compliqué : « Je vois le numéro du tram uniquement quand il est sous mes yeux. Je reconnais les couleurs des trams et donc associe telle couleur à tel chiffre. Pour les bus, c’est plus compliqué, parce qu’il n’y a pas spécialement de couleur pour les différencier. »

Il lui arrive aussi de bousculer involontairement quelqu’un : « C’est parce que je ne l’ai pas vu. Cela m’arrive également avec les enfants, si je ne regarde pas vers le bas, je ne les vois pas. »

De même lorsqu’elle fait ses courses : « Je dois mettre les étiquettes des produits tout près de mes yeux pour pouvoir les lire ! »

La cuisine peut aussi amener son lot de difficultés : « Lorsque je dois verser du liquide d’un contenant à un autre, il m’arrive d’en renverser à côté ou d’en mettre partout ! »

Elle a cependant une parade : « J’utilise des entonnoirs ou du matériel similaire. Je trouve tout le temps de petites astuces. »

Dans les tâches quotidiennes ses enfants répondent souvent présent : « Ils se rendent très bien compte lorsqu’il y a quelque chose que je n’arrive pas à faire, ils viennent spontanément m’aider. »

Chantal s’est toujours adaptée : « Je vis comme cela depuis 30 ans et j’essaie de le faire le plus normalement possible. C’est plutôt mes troubles neurologiques qui me posent problème, mais c’est un autre sujet. »



Le milieu professionnel
Dans les entreprises classiques, l’accent est souvent mis sur la productivité : « À chaque fois que je terminais un stage, j’avais le même retour : vous êtes polie, ponctuelle, vous avez un bon contact avec la clientèle, mais en revanche vous n’êtes pas assez productive ! »

Chantal pense que ces entreprises ne proposent pas encore assez d’opportunités pour les personnes en situation de handicap : « Les adaptations dépendent de l’emploi effectué et sont prises en charge par l’assurance-invalidité. Si la personne avec handicap arrive à fournir le travail demandé, elle pourrait travailler dans une entreprise dite normale. Peut-être faudrait-il y introduire un quota de places réservées pour des personnes en situation de handicap ? »

Elle en est convaincue, une personne avec handicap visuel ou physique peut fournir le même travail que quelqu’un d’autre : « Tant que son cerveau fonctionne et que quelques adaptations sont faites, il n'y a pas de problème ! »

À l’atelier des Moyens Auxiliaires de la Fondation Foyer-Handicap, elle a pu trouver un poste adapté qui lui correspond : « Aujourd’hui, je m’épanouis dans ce travail ! »



Son message
Chantal souhaiterait que les gens se posent les bonnes questions avant d’émettre des critiques vis-à-vis de personnes qui portent, par exemple, des lunettes : « Il se peut que la “personne à lunettes” souffre d’un handicap plus important qu’une simple myopie. Donc, avant un jugement à l’emporte-pièce, il faudrait prendre un moment pour se poser les bonnes questions, se demander pourquoi elle n’arrive pas à faire certaines choses. Et la réponse pourrait être que cette personne a peut-être un handicap invisible. » 

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