Et si c’était vrai?

L’Evangile selon Pilate est le second livre du belge Eric Emmanuel-Schmitt. Il raconte la vie de Jésus et plus particulièrement les derniers temps (crucifixion et résurrection). Ce roman est rédigé sous la forme d’une lettre que Ponce Pilate adresse à son frère. Il lui explique comment il doit mener une enquête sur la disparition d’un homme crucifié. Celle-ci agite les Juifs sous sa responsabilité. Il s’agirait peut-être d’une mascarade…

Je suis passionnée par l’écriture philosophique d’Eric-Emmanuel Schmitt. Elle est si vivante et éclatante de vérités communes, comme si l’auteur arrivait à poser sur papier nos propres réflexions sur des thèmes comme la maladie (Oscar et la Dame rose), le problème des réfugiés (Ulysse from Bagdad), des orphelins (l’Enfant de Noé), du racisme (Ibrahim et les fleurs du Coran), de la conformité (Le Sumo qui ne voulait pas grossir), etc… Auteur extrêmement prolifique, il a écrit aussi bien des romans philosophiques que des recueils de nouvelles, un essai et des pièces de théâtre. Comme j’écris également, il m’inspire beaucoup dans mon style : écrire pour vivre ; vivre pour écrire.

J’ai beaucoup aimé le livre l’Evangile selon Pilate, une vue très personnelle de la vie du Messie. Le point fort de ce récit est qu’il se demande si Yéshua avait pleinement conscience de sa divinité lors de sa vie et s’il l’acceptait pour l’éternité. Or l’auteur part du postulat que Jésus s’est battu contre lui-même jusqu’à accepter le message de son cousin Yohanan qui baptisait. Celui-ci l’a regardé parmi la foule et lui a dit quelque chose qui a changé sa vie.
Nous retrouvons tous les protagonistes du récit biblique sous leurs noms hébraïques. La vie à cette époque est magnifiquement décrite dans tous ses détails quotidiens. Eric-Emmanuel Schmitt a fait un travail de recherche impressionnant, comme à son habitude !

Le récit est à la première personne du singulier, au nom de Yeshua dans la première partie, puis au nom de Pilate dans la seconde. On rencontre le futur Messie petit enfant jusqu’à sa mort et sa résurrection. Pilate a sa propre explication face à une mort extraordinaire et à la résurrection, expliquée par le médecin romain de l’époque. En effet, à ses yeux, Yeshua est un imposteur jusqu’à ce qu’une personne importante dans sa vie le convainc du miracle et de sa portée religieuse.

J’ai appris beaucoup de choses sur les personnages de l’époque et surtout sur les conséquences incroyables de la vie de Jésus pour les romains et pour les Juifs.

Dans la version augmentée de 2006, Eric-Emmanuel Schmitt ajoute le récit du «manuscrit volé». Il y raconte comment son manuscrit lui a été dérobé et comment il s’en est tiré pour l’écrire à nouveau ! En effet, tous les supports sur lesquels il avait écrit son roman (y compris clé USB et version ordinateur) ont été volés à son domicile.
Cette partie m’a moins intéressée mais je pense que c’était important de le dire pour nous faire prendre conscience de la difficulté et du malaise qu’on a en tant qu’écrivain à perdre tout son écrit au moment de l’édition!

En résumé, ce livre un peu délétère est à lire absolument, aussi bien pour son écriture facile et philosophique, que pour l’histoire de Pilate et Yeshua en elle-même. Les doutes qui y sont intégrés forment un tout très vivant et… déséquilibrant.

Citation
«La souffrance n’est pas une occasion de haïr, c’est une occasion d’aimer.
C’est la seule chose que nous apprend la mort : qu’il est urgent d’aimer.
Rien ne supprime le chagrin ; mais le vrai cœur le rend utile et bénéfique.»