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Baskets au fitness

le mercredi, 22 juin 2022. Publié dans Culture et loisirs, Contes

Baskets au fitness

Rosa a terminé son sport et elle se prélasse sur le banc des vestiaires du fitness un instant, avant de se changer et de rentrer chez elle. Cela fait quatre ans qu’elle va à cette salle de sport régulièrement et c’est comme un rituel pour elle d’y passer du temps le vendredi soir, quand la semaine de travail arrive à son terme.

Cette semaine, Rosa a eu beaucoup à faire. Elle travaille pour une maison qui vend des produits de maquillage, la marque « Coquillages ». Elle vit seule et cet été elle aura bientôt 30 ans.

Mais pour l’instant, on est encore au mois de mars. Les plantes commencent à bourgeonner, le printemps arrive petit à petit, il pleut souvent mais la température est en train de remonter.


 

Elle vient de monter des escaliers, elle a fait du vélo, elle a couru sur le tapis roulant. Elle s’est bien amusée à éliminer tout son stress, elle va passer un congé bien détendue. Elle s’apprête à prendre sa douche quand une autre femme l’interpelle.

C’est Teresa, une vieille copine qu’elle avait perdu de vue depuis les études. Elles échangent quelques banalités : « Qu’est-ce que tu fais maintenant ? Depuis quand es-tu inscrite dans ce fitness ? Et les amours ? »

Teresa lui raconte qu’elle a eu une fille qui est à la maison et que c’est le papa qui la garde en attendant qu’elle fasse son sport. Teresa vient d’arriver au fitness alors que Rosa est sur le point de partir, il est 21 heures. Elles s’échangent les numéros de téléphone, mais Rosa sait bien que Teresa est très occupée avec son enfant et qu’elle ne la verra pas souvent...

Teresa lui donne une accolade et lui dit « à bientôt ! » et elle sort des vestiaires.

Rosa file sous la douche, puis s’habille et quitte le fitness. Samedi et dimanche, elle ne fait rien de spécial, le temps coule, elle observe la nature, elle rencontre des jeunes gens, va voir sa maman.


 

Devant sa fenêtre, il y a un grand arbre qui est en train de bourgeonner. La nature suit son cours et cela la rend heureuse : bientôt, il ne fera plus froid du tout et le soleil lui chauffera le visage plus souvent. Elle se promène au bord du Rhône et elle sent que ses muscles ont bien travaillé suite au sport de la veille. Elle est crevée !

La semaine qui suit, Rosa a toujours beaucoup de travail au bureau. Elle s’occupe du marché asiatique, surtout le Japon. En effet, les Japonaises sont très friandes des produits Coquillages et elle est chargée de la communication avec plusieurs revues de la presse féminine japonaise qui diffusent la marque.


 

C’est mercredi et alors qu’elle est en train de leur envoyer les dernières photos de mannequins maquillées avec les produits de la marque, une cheffe de groupe à la revue « Masques et Maquillages », l’une des dernières revues du moment les plus lues par les Japonaises, tente de la contacter par téléphone.

Mais celle-ci ne parle que japonais, alors que Rosa travaille d’habitude en anglais.

Rosa ne comprend rien de ce que lui dit son interlocutrice et elle tente de lui demander : « May I talk with someone who speaks English, please ? » (Puis-je parler à quelqu’un qui parle anglais, s’il vous plaît ?) Elle répète et répète la question et elles s’énervent les deux de plus en plus.

« I’m sorry, I can’t understand what you’re saying !!“ (Je suis désolée, je ne peux pas comprendre ce que vous dites), enchaîne Rosa qui est très très embêtée, car c’est la cliente de Coquillages la plus en vogue du moment.

Pour finir Rosa est fatiguée de ne pas être comprise et elle décide de raccrocher au nez de la Japonaise. Sa respiration est accélérée et elle se sent mal. En effet, un sentiment entre la tristesse et la colère est en train de la parcourir brutalement. Alors elle prend quelques minutes sur sa chaise pour souffler, se sentant impuissante face à ce monde si mystérieux à l’autre bout de la planète.

« Il a dû y avoir une erreur quelque part… » Réfléchit-elle et elle compose le numéro de Hiyori qu’elle connaît, celle-ci étant la principale coordinatrice et porte-parole du groupe de revues desquelles fait partie « Masques et maquillages ». Hiyori parle le français et Rosa lui explique la situation.

Mais Hiyori est absente ce jour-là, car sa fille de 3 ans est tombée malade. Elle a dû s’absenter du bureau. On lui dit de rappeler le lendemain.


 

Jeudi, elle recompose le numéro et demande à parler à Hiyori qui est présente cette fois-ci. Il est huit heures du matin, ce qui signifie qu’il est déjà 16 heures à Tokyo. Hiyori est au courant de l’histoire et elle informe Rosa que la cheffe de groupe qui a tenté de la joindre ne connaissait pas l’anglais, qu’elle s’excuse en son nom pour la complication.

Rosa répond : « Mais en fait, qu’est-ce qu’elle voulait ? » Hiyori lui dit que Masques et Maquillages a changé sa politique, que pour réduire les coûts, la revue a décidé d’engager des gens moins qualifiés.

Rosa médite : « Mais je ne connais pas le japonais, comment on va faire pour communiquer ? »

Hiyori entend le silence de Rosa et lui déclare qu’il va falloir qu’elle apprenne quelques rudiments de japonais. Rosa reste songeuse, la conversation prend fin et elle appelle son chef de groupe, Antoine, à qui elle résume ce qui est en train de se passer.

Antoine écoute et se dit « Merde ! On a perdu un client ! ». Il n’entend pas remplacer le poste de Rosa qui demande « Qu’est-ce qu’on fait ? ». Il dit qu’il n’a aucune idée pour le moment. Rosa raccroche et prend sa pause.

Devant la machine à café, elle expose la situation à une collègue d’un autre étage, Marie, qui lui réplique qu’elle connaît le boss à Paris qui peut restaurer la situation, qu’elle va l’appeler. Elle espère que Marie sera efficace et que tout va s’arranger.

Elle retourne à son bureau et poursuit sa besogne. Puis la journée arrive à son terme, Rosa rentre chez elle.


 

Le lendemain, Rosa ouvre un œil, puis un autre. Dur, dur de se lever, c’est la fin de semaine.

Comme chaque vendredi, Rosa se dit qu’elle en a marre du rythme effréné de la semaine et elle se réjouit de rejoindre la salle de sport en fin de journée pour se défouler.

Finalement, le patron parisien a décidé de remplacer la cheffe de groupe du Japon en choisissant quelqu’un qui parle le français. En effet, il engage une Japonaise qui vit à Paris depuis 10 ans et qui cherche à retourner au pays. Rosa se sent soulagée et se dit : « Purée, j’ai eu de la chance ! »

À 18 heures, Rosa sort du travail et va à la salle de sport où elle se dépense sur les engins pendant un peu de temps et finalement après sa séance, elle se prélasse sur le banc des vestiaires un bon moment, avant d’aller prendre sa douche.

 

Sonia est rédactrice à Synergies depuis fin 2019.

C’est avec plaisir qu’elle a intégré l’équipe de la rédaction pour partager des histoires illustrées et des articles.

Depuis longtemps, elle a montré de l’intérêt pour l’écriture et a participé à divers ateliers, notamment celui de Denise Martin qu’elle a fréquenté assidument pendant 2 ans à l’Association Co’errance.

Sonia a pu également pratiquer depuis plus de quinze ans la peinture où généralement elle n’a utilisé que quelques éléments figuratifs. Entre autres, elle a trouvé un lieu de création à l’Association Parole où elle a rencontré Heidi Rasmussen et Sigrid Beck qui sont artistes et art-thérapeutes. Elle a beaucoup appris au contact de celles-ci et donc elle a pu faire des expositions en 2011 et en 2019.

Mais ce n’est qu’en 2017 qu’elle en vient vraiment au dessin figuratif à travers un atelier de dessin d’observation, toujours à l’Association Parole. En effet, c’est grâce à cet espace d’expression donné par Diego Licchelli, art-thérapeute et coordinateur de cette association, qu’elle se consacre de temps à autre à faire des croquis dans la ville de Genève et avec le concours de son activité professionnelle à Synergies, elle a maintenant l’occasion d’assembler ces deux moyens d’expression.